Bon, depuis que j’ai entendu les déclarations de notre cher ministre de l’éducation sur des évaluations de maternelle, j’ai des boutons! A force de rencontrer des enfants en difficulté scolaire pour des raisons diverses et variées, je fais des bonds quand j’entends qu’on va faire des évaluations. Comme si les évaluations résolvaient les problèmes.
J’ai quand même fait l’effort d’aller aujourd’hui sur le site du Monde pour y lire une interview de Luc Chatel, espérant lire un truc un peu plus éclairé.
Et bien c’est pire que ce que je croyais. Ses explications ne sont pas du tout claires et il confond quand même beaucoup de choses. Ce qui laisse mal augurer de la suite.
Revue de détail:
Des enfants à risque aux enfants fragiles: d’abord on parle d’enfants à risque puis d’enfants fragiles. De quoi parle-t-on? De futurs délinquants? D’enfants souffrant de troubles des apprentissages? Ah, non, on parle des enfants qui risquent d’être en échec scolaire! Donc il faut repérer les lacunes. Bon, mais faut-il vraiment faire des évaluations pour ça? N’a-t-on pas déjà une foultitude de tests psychométriques qui peuvent être faits par des psychologues scolaires pour repérer les troubles de l’apprentissage?
Ah, vous me dites qu’il n’y a plus de psychologues scolaires. Ah, je comprends mieux.
Ensuite, le ministre fait le grand écart pour expliquer la différence fondamentale entre ces futures évaluations qui n’en sont pas mais qui sont plutôt des tests mais pas des tests comme ceux de CM1 et de 6ème (j’espère que vous suivez encore…). En fait les tests de CM1 et 6ème (qui sont des évaluations nationales) ne seraient des évaluations que du système scolaire français. Ah bon? Mais pourtant on donne les résultats aux parents et il semble bien que les enseignants les considèrent comme des évaluations des élèves! Mais visiblement, on ne vit pas sur la même planète.
Et ce n’est pas fini. M Chatel se défend ensuite sur l’évaluation des comportements et nous rejoue le couplet “tout se joue avant 5 ans”. En fait, il veut repérer les enfants qui viennent de “milieux culturellement défavoriséx” et qui n’ont pas assez de vocabulaire. Ah, j’ai compris, c’est la faute des salauds de pauvres qui n’apprennent pas à leurs enfants à parler et qui ne les emmènent pas à la bibliothèque! J’aurais dû y penser plus tôt! C’est vrai, ça, l’école n’est pas le lieu pour apprendre. On doit être conforme AVANT d’y entrer. Ben, fallait le dire tout de suite.
Et on est sensé combattre l’échec scolaire avec ça!
Et évidemment, il n’est pas indiqué comme on va faire ensuite, quand les difficultés auront été repérées. Il y a de moins en moins de médecins scolaires, de maitres E ou de maitres G.A-t-on vraiment les moyens de ne pas faire l’effort de former tous les enfants?
C’est bien gentil de mettre des étiquettes mais encore faudrait-il que cela mène à des actions efficaces. Mais là, pas la moindre trace de début de commencement de solutions…
Le ministre critique les profs en disant qu’ils n’ont pas la culture de l’évaluation de leurs pratiques. C’est sans doute vrai mais c’est aussi vrai pour lui car j’aimerai bien qu’on évalue l’effet de ses annonces sur la prise en charge des enfants ayant des difficultés!Et puis il devrait peut-être évaluer la qualité de sa communication à la quantité d’incompréhensions qu’elle suscite (puisque c’est son argument “on ne m’a pas bien compris”).
Bon allez, je vais être sympa, il a dit un truc bien: il faut tester la conscience phonologique des enfants (leurs capacités à comprendre la segmentation des mots en sons) parce que c’est un prérequis de la lecture. Mais il me semble bien que c’est une capacité qui s’acquiert en maternelle grâce à des exercices. Et si ça ne marche pas bien, je vous conseille de prendre RDV avec un orthophoniste sans tarder…
Bon, j’étais un peu énervée aujourd’hui…